LYON 1ère

Prix Lumière 2024 / Isabelle Huppert : « Le cinéma, c’est le triomphe de l’instant présent »

Laura Nodari

Laura Nodari

« J’ai du mal à croire tout ce que j’entends sur moi ». Ce samedi 19 octobre, Isabelle Huppert a rencontré la presse pour revenir sur le Prix Lumière qu’elle a reçu à Lyon. Souvenirs de tournage, cinéma à l’international, mode, répétitions, musique… Ce moment a permis un retour sur l’impressionnante carrière de l’actrice. Cependant, cette rétrospective est indissociable d’un regard aussi tourné vers le futur et surtout d’une affirmation de la primauté de l’instant présent.

La conférence a débuté par une recommandation qu’elle ferait à une jeune femme aujourd’hui. Il s’agit d’une phrase qu’elle se dirait à elle-même : « être curieuse avant tout : voir plein de choses, regarder pleins de films, lire beaucoup de livres, et entretenir de la confiance en soi. »

La caméra ayant commencé à la filmer très jeune, l’artiste française avait très vite ressenti « le sentiment que c’était ma place ». Par exemple, avec La Dentelière de Claude Goretta, sorti en 1977 elle avait eu l’impression en lisant le livre que le personnage était écrit pour elle en décrivant « des yeux verts, de grosses joues et tâches de rousseur ».

Elle est également revenue sur le premier prix qu’elle avait reçu :

« Le cinéma c’est le triomphe de l’instant présent. »

D’ailleurs elle remarque que le rôle qui l’a le plus marqué est toujours le dernier. Par exemple, actuellement c’est La Prisonnière de Bordeaux de Patricia Mazuy, son tout dernier film.

« Je ne garde pas de trace des rôles (…) moi ce qui me plaît c’est le faire, une fois qu’il est fait je n’y pense plus parce que si je devais y penser ce serait trop lourd à porter ».

Elle a également expliqué quel est son moteur pour continuer de passer devant la caméra :

Elle s’est montrée optimiste pour le cinéma : « malgré une menace, il y a une survie du cinéma ».

Elle a annoncé aussi que son prochain film sera avec une réalisatrice allemande.

D’ailleurs, elle est revenue sur sa carrière à l’international, notamment sur le fait de jouer dans une autre langue. L’actrice qui dépasse nos frontières sur les tournages, a mentionné la manière particulière de travailler la langue et son mélange avec le réalisateur Hong Sang-soo.

« J’ai envie d’aller partout ! »

« Le cinéma n’a pour vocation que d’être international, de parler au monde entier. » 

Elle a également rappelé son souvenir le plus marquant des Festivals Lumière auxquels elle a assisté. Il s’agit de la présentation qu’elle avait faite en 2012, à la Halle Tony Garnier, aux côtés de Michael Cimino pour son film La Porte du Paradis. Pour elle, Lyon a offert au réalisateur, avant sa disparition, la reconnaissance que le film n’avait pas eu aux Etats Unis.

En outre, concernant cette dimension internationale du cinéma, elle remarque aussi que « le cinéma est devenu plus politique mais dans le meilleur sens du mot ».  En effet, pour elle, le cinéma a aussi une fonction de raconter le monde, il dénonce : « parfois il est contre, parfois il est pour : il faut qu’il reste libre avant tout ». L’importance est de toujours garder cette indépendance d’expression et que le cinéma reste « libre de dire les choses comme elles doivent être dites pas forcement comme on a envie qu’elles soient dites ».

Par ailleurs, l’actrice, toujours élégante dans la vie comme à l’écran, a confirmé l’importance qu’ont pour elle les costumes, «  la première impression qu’on donne aux spectateurs », indissociables du langage du corps essentiel chez un personnage.

Enfin, notons qu’elle est revenue sur l’essence de la froideur, caractéristique sublime de la manière de jouer de l’actrice. Elle explique cet attribut parce que selon elle : «  l’émotion nait de la froideur ; alors que l’émotion tue l’émotion. (…) C’est ma nature. »

Après avoir présenté plusieurs de ses films au programme du festival, tourné le traditionnel remake de Sortie d’Usine avec les autres invités du festival, offert une séance de dédicaces aux lyonnais et inauguré sa plaque sur le mur des cinéastes, rue du premier film, Isabelle Huppert est repartie dans ses mystères.